Modification profonde de la relation client, nouvelles perspectives dans la valorisation de l’image de marque, personnalisation de l’offre et des ciblages, le digital révolutionne les possibilités offertes aux organisations dans leur manière d’interagir avec leurs clients et prospects. A tel point que la majorité des entreprises est aujourd’hui dotée d’une stratégie digitale. Mais l’ère de l’information digitale couplée à l’apparition de défis sociaux-environnementaux contemporains a façonné un nouveau consommateur de plus en plus soucieux des conséquences de ses choix de consommation. Dans ce cadre, la notion d’éthique rencontre une résonnance nouvelle dans les stratégies digitales des communicants qui souhaiteraient exploiter cette aspiration naissante chez les consommateurs. Alors quelle place pour l’éthique en communication et marketing digital aujourd’hui ? Voici nos éléments de réponse en 5 minutes.
Qu’est-ce que l‘éthique en marketing et communication web ?
Décision éthique, morale ou légale ?
Pour bien commencer il faut différencier les considérations éthiques des construits moraux et des obligations légales.
Les obligations légales s’imposent à notre action instaurant un cadre auquel il n’est (en principe) pas possible de déroger. Elles s’opposent ainsi à la morale et à l’éthique qui concernent le respect de règles non obligatoires auxquelles l’individu se soumet volontairement.
La morale renvoie à des construits subjectifs figés sur ce qu’il est bien de faire ou non tandis que l’éthique doit s’envisager comme une discussion collective ouverte sur le bon et le néfaste : un questionnement des pratiques devant aboutir à une adhésion collective autour de bestpratices.
Quelle place pour l’éthique dans le digital ?
Dans notre monde centré sur le client, le consommateur est, de manière plus pragmatique, le moteur du questionnement éthique des organisations. C’est la traduction de ses aspirations socio-environnementales en volonté de consommer autrement qui va faire évoluer l’éthique et les pratiques.
La question de l’éthique est ainsi au cœur du marketing et de la communication web :
- D’une part, l’intérêt de cette discipline se base sur le recueil et l’exploitation de données personnelles de consommateurs de plus en plus sensibles aux questions de vie privée et de trace numérique.
- D’autre part, la demande croissante en responsabilité environnementale des marques par les consommateurs pose question à l’heure où l’industrie du web se hisse parmi les premiers secteurs polluants.
Pourquoi faire le choix d’une stratégie digitale éthique ?
On distingue deux motifs qui poussent les entreprises à développer une stratégie digitale éthique.
Pour garantir la légitimité d’un positionnement
Par conviction, motivées par des bénéfices d’image ou par l’apparition de segments nouveaux, de nombreuses marques élèvent de grandes valeurs socio-environnementales au rang d’élément de différenciation. Mais ce positionnement et la valeur qui en découle repose alors grandement sur leur crédibilité sur la question. Une légitimité qui doit donc être préservée et entretenue au niveau de la stratégie web.
Pour répondre à une demande (ou l’anticiper)
Que cela soit en termes d’éco-responsabilité ou de respect de la vie privée dans la gestion des données, la communication et le marketing digital touchent de près des sujets de société complexes. Ces matières sont ainsi susceptibles de nourrir beaucoup de débats dans les années à venir. Relativement préservées du débat public jusqu’alors, les attentes en termes d’éthique n’en sont pas moins existantes chez les consommateurs. Adopter une stratégie digitale éthique c’est ainsi améliorer son image et la satisfaction chez ses « consomm’acteurs » actuels tout en se prémunissant d’une hausse prévisible des exigences globales.
Les axes d’une stratégie digitale éthique réussie
Une stratégie en ligne éthique repose sur quatre piliers principaux. Si ces points ne sont pas exhaustifs, il constitue un cadre solide sur lequel s’appuyer dans la construction d’une pensée stratégie éthique online.
Pensez cohérence et transparence
Pour être efficace, une stratégie web se revendiquant éthique doit être cohérente avec le positionnement, les pratiques et les valeurs de l’organisation.
Comme nous l’avons vu, l’éthique de la marque élevée au niveau d’élément différenciation exige son engagement total afin de préserver sa crédibilité et sa légitimité. Y compris dans son action en communication et marketing digital. La recherche d’authenticité dans la démarche de l’audience de ce type d’organisation ne saurait transiger avec une vision parcellaire de ses engagements par l’entité.
Toutefois un engagement éthique n’est pas réservé à cette catégorie d’organisation : réduire son impact environnemental dans sa stratégie web n’est pas réservé à Green Peace et aux produits écoresponsables. Mais, l’entreprise qui s’engage dans des process digitaux éthiques doit également veiller à préserver un savant équilibre lorsqu’il s’agit de communiquer à leur sujet. En effet, le bénéfice mis en exergue par la conduite éthique doit être perçu comme pertinent et non marginal par rapport à l’activité globale de l’enseigne au risque d’être considéré comme une tentative de washing. Tempérance et modération sont ainsi primordiales.
Le washing c’est l’appropriation hypocrite par des marques de grandes causes socio-environnementale socialement porteuses dans le but de dégager un bénéfice d’image indu au vue de leur activité globale. Une pratique qui a connu de grandes heures ces dernières années (McDo, Total, secteur automobile…) mais qui a dans le même temps doté le consommateur d’un esprit plus critique et averti à son sujet. Une prise de conscience qui montre ses premiers effets concrets (Total ne sera pas partenaire premium des JO 2024 se réclamant plus « verts ») et annonce une condamnation grandissante de la pratique qu’il convient donc d’éviter. Promouvoir l’image d’une boucherie sur le thème du respect du bien-être animal est ainsi un risque important. S’inscrire dans une démarche sincère, cohérente et pertinente sera primordial sans pour autant être garant de succès tant le parallèle s’assimile naturellement à une tentative de washing.
Deux exemples de washing évidents par Total :
Pour tout savoir sur comment contruire une stratégie d’éco-communication durable et se préserver du washing c’est ici :
Pensez vie privée
Inscrire la communication et le marketing digital dans une perspective de respect de la vie privée est un challenge moderne dans la mesure où la collecte et l’exploitation des données personnelles est son premier moteur. Un challenge capital au regard de la potentielle explosivité du sujet sur l’opinion publique (pour le moment relativement désintéressée) et des innovations de plus en plus intrusives qui permettent d’aller toujours plus loin dans la collecte des données (Quelle place pour les datas collectées par enceintes connectées au cœur même des foyers ?).
Les pouvoirs publics ne se sont pas abstenus de se saisir de ces sujets et ont légiféré. Depuis son entrée en vigueur en mai 2018, le Règlement Général sur la Protection des Données fixe un cadre ambitieux à l’acquisition, à la gestion et au traitement de la data en France écartant les pratiques les plus nocives. Mais à la manière du dopage dans le monde du sport, le législateur aura toujours un retard sur une pratique du web portée par l’innovation et où l’anonymat garde une place importante. Dans ce cadre, quid des pratiques de zone grise comme les outils de growth hacking, web-scraping ou le recours à des logiciels tiers de démarchage automatisé sur les réseaux sociaux non supportés officiellement ?
Le recours à ces pratiques dont l’éthique est discutable doit être envisagé et arbitré par un calcul avantage, risque. Ainsi, elles sont davantage l’apanage des start-ups. Les risques en termes d’image sont plus faibles au vue de la notoriété naissante de ces entreprises et ces pratiques servent (assez efficacement) leur besoin de croissance rapide pour un coût dérisoire. Mais elles constituent néanmoins un risque de détérioration d’image à moyen terme qu’il peut être judicieux d’éviter.
Pensez personnalisation de l’offre
Collecter de la donnée oui, mais dans quel but ? L’éthique de la communication et du marketing digital doit aussi trouver son fondement dans la pertinence de la donnée acquise et de son traitement systématique et stratégique. Accumuler une importante quantité de donnée inerte représente un coût humain, monétaire et potentiellement d’image non négligeable. Mais vos données récoltées vous sont-elles vraiment utiles ? Et vous assurent-elles un Retour sur investissement (ROI) satisfaisant ?
Connaître sa cible n’a jamais été si important. Mon système segmentation, positionnement, ciblage est-il pertinent et me permet-il de dégager une persona claire afin d’orienter positivement ma stratégie digitale ? En connaissant votre persona, vous connaissez votre interlocuteur, ses habitudes, ses désirs et ses aspirations. Dès lors, vous êtes en capacité de développer une personnalisation de l’offre et de l’expérience client par l’optimisation des points de contacts web.
Aussi, on en revient à la fameuse aspiration de la communication du bon message, à la bonne personne, au bon moment. Mais internet offre des possibilités de ciblage nouvelles et la question qu’il convient aujourd’hui de se poser est : de quelles datas ai-je besoin pour toucher le bon client, au bon moment avec le bon message ? Ce afin de maximiser la pertinence, la qualité et le ROI de cette interaction. Un haut niveau de personnalisation des offres adressées revêt une dimension éthique importante car elle permet de diminuer le bruit et l’invasion publicitaire négativement perçus par un destinataire mal ciblé.
Pensez Inbound marketing
Une stratégie digitale ne doit plus être simplement pensée comme une relation allant de l’entreprise vers le consommateur par la publicité online et le push marketing. Le digital est aujourd’hui un puissant outil d’information pour un individu qui se veut mieux renseigné et davantage acteur de sa consommation. Ainsi, le web constitue une base de données de référence dans la quête d’un choix de consommation éclairé.
L’inbound marketing consiste pour une organisation au développement d’un ensemble de contenus qui ne sera pas poussé publicitairement auprès du prospect mais que celui-ci va consommer volontairement au cours de sa recherche de solutions pour satisfaire un besoin. D’un point de vue plus large, l’inbound marketing va concerner toutes les actions qui vont amener un individu considérer ou s’adresser par lui-même à une marque (livres blancs, tutos, blogs, jeux…).
On comprend bien pourquoi cette pratique trouve tout son sens, l’inbound marketing constitue aujourd’hui :
- Une inversion dans le paradigme de la relation d’acquisition client ;
- Une solution marketing/communication non invasive ;
- Une interaction avec l’organisation maximisant l’attention de l’individu qui s’y soumet volontairement ;
- Une stratégie de long terme conférant à l’émetteur une aura de spécialiste auprès des clients.
L’inbound marketing s’inscrit donc pleinement dans une stratégie digitale éthique par ses caractéristiques propres mais va dans le même temps permettre de générer des analytics précieux concernant uniquement des prospects dotés d’un niveau de maturité certain. Des données à haute valeur ajoutée qui s’inscrivent pleinement dans une démarche de personnalisation de l’offre abordée ci-dessus.
Florian Bonnet.