Stratégies de Communication Cinématographique : Barbie et les coups de maître qui ont ébranlé l’industrie

Avec 1,35 milliard de dollars de recettes, le film Barbie vient de devenir le plus grand succès jamais enregistré au box-office mondial par la Warner Bros. © JUSTIN TALLIS / AFP / LE POINT

L’avènement des réseaux sociaux a profondément modifié la manière dont l’industrie cinématographique aborde la communication et le marketing. Cette transformation est clairement démontrée par la campagne marketing et communication du film Barbie, orchestrée par l’Agence Marques & films.

L’Effet des réseaux sociaux sur la stratégie de communication dans l’industrie cinématographique

Le film Barbie illustre parfaitement une stratégie de communication et de marketing réussie. Un exemple notable de cette stratégie fut la mise en location de la célèbre maison de poupée sur Airbnb. Cette opération visait principalement à susciter la conversation autour du film, tant dans les médias que sur les réseaux sociaux, plutôt qu’à inciter réellement les gens à louer la villa.

À l’occasion de la sortie du film « Barbie » réalisé par Greta Gerwig, Airbnb a ainsi proposé la location de la maison de rêve de la célèbre poupée Mattel située à Malibu. © AIRBNB

D’autres dérivés du film ont également vu le jour, tels que des produits cosmétiques, une compagnie d’assurance, des tapis, des glaces, des bougies et même des rollers. L’équipe du film a réussi à établir des collaborations prestigieuses avec des stars internationales telles que les chanteuses Dua Lipa et Nicki Minaj.

Autre élément marquant de la campagne promotionnelle du film : la rumeur d’une prétendue pénurie mondiale de peinture rose. En réalité, il s’agissait d’une pénurie partielle d’un certain type de peinture rose de la marque Rosco, due à la création des décors pour le film. Mais ce fut l’occasion parfaite pour susciter à nouveau la conversation autour du film, et ce à moindre coût.

Les retombées de cette stratégie furent considérables : le nom de Barbie était sur toutes les lèvres, et le film a enregistré le meilleur lancement de l’année 2023 avec 155 millions de dollars de recettes dès le premier week-end.

Barbie n’est qu’un exemple parmi d’autres 

Le cas de Barbie n’est qu’un exemple parmi de nombreux autres. Pour le lancement de la quatrième saison de Stranger Things sur Netflix, l’équipe de production a adopté une technique de marketing dite « street marketing », en faisant apparaître des créatures de la série dans la rue et même sur une plage en Australie.

En Australie, jour de la sortie tant attendue. Sur la plage de Bondi Beach à Sidney, un portail vers « l’Upside Down » accueille les marcheurs dès les premières lueurs du matin. Une équipe habillée dans des combinaisons de protection et les maitres nageurs de la plage sécuriseront rapidement le périmètre pour garder les (trop) curieux à distance. Tout est fait pour y croire et laisser un vent d’inquiétude s’installer sur ce lieu ultra fréquenté. © NETLFIX / AGENCE LA CHAMADE

💡 Le street marketing ne fonctionnerait pas sans l’aide des réseaux sociaux. C’est l’engouement qui suit les actions marketing comme celles-ci qui est réellement intéressant : tout le monde en parle, à l’échelle internationale.

Un exemple emblématique de promotion innovante est celui du Projet Blair Witch, un film d’horreur américain sorti en 1999. Les réalisateurs ont été parmi les premiers à exploiter Internet pour promouvoir leur film, utilisant notamment des bandes sonores de magnétophone et des affiches de disparus pour les personnages du film.

Leur objectif était de présenter le film comme un documentaire authentique en suggérant une véritable disparition des trois protagonistes. Encore une fois, la fiction devient réalité, pour apporter directement le film dans la vie réelle des potentiels spectateurs, et créer une émotion, comme la peur, pour susciter un engouement.

Cette stratégie s’est avérée extrêmement rentable, le film atteignant des recettes au box-office de 248 millions de dollars pour un coût de production de 60 000 dollars, soit un retour sur investissement impressionnant de 414 000 %. Il devint ainsi le deuxième film le plus rentable de l’histoire du cinéma, juste derrière Paranormal Activity, qui avait réalisé 193 millions de dollars de recettes pour un budget de 15 000 dollars.

Des stratégies à double tranchant

Cependant, toutes les campagnes ne se déroulent pas toujours comme prévu et une stratégie de communication soigneusement élaborée peut rapidement déraper et engendrer un « bad buzz ». C’est ce qui s’est produit pour le film d’horreur Cannibal Holocaust.

Tourné comme un documentaire, le réalisateur a joué sur la disparition des acteurs, leur demandant de rester éloignés de tout contact, famille et amis, au retour du tournage. Cette tactique s’est finalement retournée contre l’équipe du film, provoquant des rumeurs si intenses qu’un procès fut intenté contre le réalisateur.

Ce dernier a dû prouver que les scènes étaient bel et bien réalisées avec des trucages, tant le rendu était réaliste. Aujourd’hui, il devient de plus en plus difficile de distinguer un contenu authentique d’une publicité déguisée sur les réseaux sociaux. Forcément, lorsque la fiction s’invite dans le monde réel, difficile de savoir ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas.

En outre, comme illustré par l’exemple du film Barbie, le budget alloué aux dépenses marketing d’un film est désormais aussi considérable que celui alloué à sa production. Mais alors, il est légitime de se demander si c’est un film qui va sortir ou bien une véritable industrie, auquel cas qu’en est-il de la dimension artistique du cinéma ?

➡️ Le succès d’un film se justifiera-t-il par le talent du réalisateur ou celui du directeur marketing ?

Pour aller plus loin…


Inès LEFEBVRE / M2 CMHM 2023-2024