On pensait que les influenceurs étaient là pour nous pousser à acheter la dernière crème miracle.
“Ventre plat en 7 jours” (spoiler : ça ne marche pas). Mais surprise : depuis quelques mois, un nouveau phénomène émerge. La désinfluence bouleverse le marketing d’influence et remet l’authenticité au centre du jeu.
Derrière ce mouvement, il y a plus qu’un effet de mode. C’est une véritable révolution entre marques, créateurs et consommateurs.
Les internautes, saturés de contenus sponsorisés, réclament plus de transparence. Ils veulent aussi plus d’authenticité et d’honnêteté.
Et les influenceurs, eux, réinventent leur rôle : ils ne veulent plus seulement vendre, mais regagner la confiance perdue.
En somme, la désinfluence ne se contente pas de critiquer le système : elle le réinvente, redonnant au marketing d’influence une dimension plus humaine et responsable.
C’est cette mutation que nous allons explorer.
De l’influence à la désinfluence (oui, c’est une vraie tendance)
La désinfluence, c’est ce moment magique où l’influenceur, au lieu de dire « foncez l’acheter », balance plutôt un honnête « franchement, gardez vos sous ». Et le phénomène n’est pas anecdotique : le hashtag #deinfluencing a explosé sur TikTok, cumulant plus de 1,1 milliard de vues en quelques mois ((source : TikTok, 2025). Autant dire que ça ne se limite pas à deux trois vidéos perdues dans l’algorithme.
Résultat ? La communauté adore. Parce que finalement, qui n’a jamais rêvé qu’on lui évite de claquer 50€ dans un mascara qui sèche en trois jours ?
Et avouons-le : après l’affaire des “influvoleurs” dénoncés par Booba (oui, le rappeur s’est reconverti en justicier digital, entre deux clashs sur Twitter), le public commençait sérieusement à douter de la sincérité des placements de produits.
Le phénomène est global, porté par une génération Z plus critique, plus éthique et plus consciente de l’impact environnemental et social de la surconsommation.
Selon une étude HubSpot 2024, 67 % des jeunes consommateurs affirment qu’ils suivent désormais des créateurs “pour leurs avis honnêtes” plutôt que “pour leurs codes promo”.
Et près d’un sur deux se dit prêt à boycotter une marque s’il découvre un partenariat trompeur.
En clair : la désinfluence, c’est le grand retour de la sincérité numérique.
Louanne, influenceuse muscu, qui préfère dire la vérité (même si ça pique)
Pour illustrer le phénomène, inutile d’aller chercher bien loin : beaucoup d’influenceurs commencent déjà à lever le pied sur les partenariats foireux. Prenons Louanne, influenceuse muscu suivie par plus de 64 000 abonnés, qui poste des vidéos de squat plus régulières que tes séances de sport ratées du lundi, et pourtant, elle refuse de se plier aux règles du jeu marketing.
« On m’a déjà proposé de faire la promo de compléments alimentaires hyper chelous. Promis, tu les prends et t’as un corps de rêve… ou une diarrhée express. Perso, j’ai dit non. Ma communauté me fait confiance, je vais pas leur vendre du vent. »
Louanne, elle, préfère dire la vérité, même si ça veut dire refuser un gros chèque. Et devinez quoi ? Ses abonnés l’aiment encore plus. Comme quoi, être cash, ça paye aussi.
En gros, Louanne ne vend pas n’importe quoi, et ça plaît. Parce que dans un monde saturé de codes promos à -10 %, un bon vieux “non merci” sonne comme une bouffée d’air frais.
Derrière l’anecdote, on voit bien que la désinfluence traduit un changement de logique : on passe d’un marketing qui cherche à pousser un produit à tout prix (push marketing), à un marketing où c’est la confiance qui attire (pull marketing). En gros, l’authenticité devient la nouvelle monnaie.
Pourquoi ça marche ?
- Parce qu’on en a marre d’être pigeons : l’époque où on achetait tout ce qu’un influenceur montrait est finie.
- Parce que l’authenticité, c’est sexy : un “n’achetez pas” sonne plus vrai qu’un “achetez vite avec mon code promo -10%”.
- Parce que c’est rassurant : quelqu’un qui ose dire « non » paraît plus digne de confiance.
Comment la désinfluence pousse les marques à se réinventer ?
Mauvaise nouvelle pour elles : si ton produit est éclaté au sol, il y a de fortes chances qu’un influenceur le dise haut et fort… et que ça tourne sur TikTok avec le hashtag #deinfluencing.
Bonne nouvelle : si ton produit est vraiment bon, il n’aura même pas besoin d’un code promo en triple majuscules pour convaincre.
Autrement dit : la désinfluence, c’est un peu la sélection naturelle du marketing — seuls les vrais bons produits survivent.
Et certaines marques en ont déjà fait les frais…
Le cas WePink : la “fondation soin” tourne au fiasco viral

Prenons WePink Beauty, la marque de l’influenceuse brésilienne Virginia Fonseca.
Elle lance fièrement une fondation “dermomake”, censée maquiller tout en soignant la peau, un peu comme si ton fond de teint te faisait aussi un gommage, une hydratation et un câlin.
Sauf qu’en réalité… c’est plutôt la peau qui a fini par souffrir.
Les tests s’enchaînent sur TikTok, et les verdicts tombent plus vite qu’une palette Fenty sur carrelage :
le produit assèche, marque les rides, coule sous la chaleur… bref, un fond de teint qui “tient 24h”, mais seulement dans les rêves du service marketing.
Des créateurs beauté, comme Karen Bachini, dénoncent aussi la supercherie : la fameuse “formule soin” est en réalité classée “niveau 1” par l’agence sanitaire brésilienne ANVISA, autrement dit, aucun effet soin réel.
Les ingrédients stars (acide hyaluronique, vitamine E, niacinamide) sont là, mais à des doses si faibles qu’il faudrait se tartiner le visage façon millefeuille pour espérer un résultat.
Sur TikTok, la fondation devient un mème à part entière :
“Elle m’a promis un glow, j’ai eu du plâtre.”
“C’est pas du dermomake, c’est du dermadrame.”
Résultat : la marque, prise dans la tornade #deinfluencing, voit ses ventes chuter et son image se fissurer plus vite que sa fondation sur peau sèche.
Mais paradoxalement, cette crise lui a permis de se remettre en question : reformulation, transparence accrue, communication plus humble.
Comme quoi, parfois, la désinfluence ne détruit pas : elle trie.
Aujourd’hui, les marques doivent donc réapprendre à séduire.
Pas avec du bling-bling, mais avec du vrai :
– des produits qui tiennent leurs promesses,
– des créateurs qui osent dire “j’aime… mais pas tout”,
– et des campagnes où on sent encore un peu d’humain.
En clair : fini le “fake it till you make it”,
place au “show it if it’s real”.
Au final, que révèle vraiment la désinfluence ?
La désinfluence, c’est finalement la meilleure pub… contre la pub. Les influenceurs, fatigués de passer pour des panneaux publicitaires vivants, redonnent un peu d’air à leurs communautés.
Alors oui, Booba a peut-être ouvert la chasse aux influvoleurs, mais derrière, une nouvelle ère commence : celle où l’authenticité a plus de valeur qu’un chèque.
Reste une question : est-ce que la désinfluence est vraiment contre l’influence… ou simplement une nouvelle manière d’influencer ? Parce qu’au fond, quand un créateur dit “n’achetez pas ce mascara”, il laisse souvent entendre “mais celui-ci est mieux”. Autrement dit, on n’a peut-être pas tué l’influence, on l’a juste rendue plus subtile. Et franchement, si ça peut nous éviter de remplir nos placards de gadgets inutiles… on dit merci.
Le phénomène de désinfluence illustre un besoin croissant de proximité et d’expérience authentique. Ce même besoin pousse les marques à investir dans des formats expérientiels comme les pop-up stores, qui allient stratégie physique et visibilité digitale.
Sources
Le Point.fr (2023) “La « désinfluence » : les secrets de la nouvelle tendance TikTok”
FashionNetwork (2023) La désinfluence, le phénomène TikTok qui menace les influenceurs”ok”
E-marketing “47 % des Français font davantage confiance aux influenceurs qu’à…”
Hubspot (2023) “Désinfluenceurs : le défi des marques à l’ère de la transparence »
Par Inès ALONSO, étudiante en Master 2 Marketing et Communication, IAE bordeaux