Vous souvenez-vous du monde politique d’il y a 15 ans ? Le 14 décembre 2008, un journaliste irakien montrait sa rage et son mécontentent au monde entier et ce n’était pas à l’aide d’un tweet bien senti et cinglant. C’est en lançant ses chaussures en direction de George W. Bush, président américain de l’époque, que Mountazer al-Zaïdi s’est fait remarquer aux yeux du monde entier.
Pouvez-vous encore imaginer une telle action en 2022 ? N’est-il pas plus efficace de dénoncer et fédérer sur les réseaux sociaux ? Il est assez simple qu’en termes de rapport conséquences/retombées, toute action digitalisée est moins risquée qu’un lancer de chaussure vers un président américain.
Le constat est plutôt simple mais il montre à quelle vitesse à évoluer la politique dans son intégralité. La démocratisation d’internet, l’émergence des réseaux sociaux, l’accès aux smartphones sont tant de facteurs qui ont grandement accélérés nos vies. Il en va de même pour la politique. S’il a fallu quelques années de plus pour basculer complétement dans le digital, l’élection de Donald Trump aux Etats-Unis et son penchant pour Twitter a fait définitivement évoluer le monde de la politique vers l’arène du digital.
Hologramme, influenceurs, émissions en VOD ou en streaming… Les anciennes méthodes sont révolues et laisse place à une politique basée sur la communication digitale.
Un changement brutal
Les évolutions technologiques des dernières années ne que s’accroitre er par conséquent, bien des domaines se doivent de suivre. Le monde de la politique qui doit montrer un visage de leader se doit donc de suivre le rythme, voire se targuer d’aller plus vite. Si certains ont réussi à mobiliser les atouts du digital rapidement, la grande majorité de la classe politique, souvent âgée, est complétement dépassée. Un des pionniers n’est autre que Barack Obama qui s’est rapidement tourné vers les outils digitaux pour atteindre des cibles désintéressées par la politique dès 2008.
En France, nous pouvons parler d’Emmanuel Macron comme personne ayant compris rapidement l’importance des nouveaux canaux de communications. Mais le meilleur exemple dans ce domaine reste Jean-Luc Mélenchon et ses équipes qui sont globalement des exemples en termes de communication de campagne dans le digital. Comment un personnage présent sur l’échiquier politique depuis les années 70 n’a pas connu le rejet qu’on pu connaitre les autres grandes figures de la politique française ?
Si beaucoup ont raté le virage du digital, Jean-Luc Mélenchon et ses équipés ont eu du flair : parler aux jeunes et aux désintéressés de la politique en proposant des canaux innovants de communication. Ils ont su mettre à profit des hologrammes, intriguant. L’utilisation pertinente et soutenue d’une chaîne Youtube, efficace. Se mettre en scène de façon rythmée sur TikTok, bravo.
Il faut donc comprendre que le virage du digital n’était pas qu’un détail à travailler dans un coin, l’ensemble du paysage politique français actuel s’est armé dans ce domaine. Ceux n’ayant pas fait cet effort sont maintenant relégués et souvent peu appréciés.
Une transformation visible
Quand nous parlons de transformation du monde politique, nous parlons des grands enjeux sociétaux portés par les représentants élus. Aujourd’hui, être élu représente un gage de légitimité mais n’est pas une condition pour participer aux débats politiques.
La montée en puissance des actions menées par Greta Thunberg en 2018 est grandement dû à la récupération qu’en ont fait les réseaux sociaux. Par ce biais et l’ampleur qu’a connu le mouvement écologiste initié, de nombreuses systèmes politiques ont dû faire évoluer leurs façons d’agir pour se plier aux cris d’alarme de millions de personnes. S’il est toujours difficile de mesure l’impact de ce genre d’intervention, nous pouvons cependant voir qu’une jeune adolescente en 2018 a su fédérer des personnalités politiques autour de ses propos comme Angela Merkel ou la famille royale britannique.
Ces questions autour du climat sont d’ailleurs de plus en plus d’actualité mais lors de l’élection présidentielle de 2017, soit un avant les actions de Greta Thunberg, les questions environnementales pesaient réellement moins dans le débat public.
La protection de l’environnement apparaît dixième dans l’esprit des français selon une étude IFOP en amont de l’élection. En comparaison, en 2022, toujours en amont de l’élection présidentielle, une étude YouGov nous montre que le sujet du changement climatique arrive en troisième position des préoccupations des français. Si en cinq ans, beaucoup de choses ont pu évoluer, il est pertinent de penser que les nombreuses actions comme celles de Greta Thunberg sur les réseaux sociaux nous ont fait réagir. Les grandes orientations politiques ont par conséquents été modifiés.
Dans le même esprit, l’explosion du mouvement #metoo en 2017 qui a pour but la libération de la parole des femmes a pris une telle ampleur que beaucoup se sont emparés du débat dans la sphère politique. Des problèmes de fond, des problèmes sociétaux difficiles à porter en politique se posent et demandent à être traiter rapidement. En France, le nombre de plaintes en 2017 a considérablement augmenté pour des faits d’agressions sexuelles ou de viols. Le débat politique a donc été orienté sur ce sujet et le mouvement continue de vivre, même cinq ans plus tard. La force des canaux digitaux continue a influé sur la politique d’un pays comme la France.
Des espaces dangereux
Les outils de communication digitale sont acteurs du changement politique mais ce sont également des outils qui peuvent avoir des effets malsains. Les canaux historiques d’informations fonctionnent avec plus ou moins d’éthique mais le métier de journaliste demande des sources dans les informations, de recouper ces informations, de faire le tri. Sur des canaux comme les réseaux sociaux il n’y a aucun filtre, aucune limite à la désinformation ou à la propagande. Paradoxalement, ce sont des sujets récents et récurrents mais théorisés bien avant notre époque moderne. Toutes ces techniques sont utilisées en géopolitique durant de nombreuses périodes avant l’avènement du digital.
Savoir s’exprimer, savoir convaincre… Les atouts forts des personnalités de la politiques sont les mêmes que ce soit en dehors des réseaux sociaux ou justement lorsqu’ils sont utilisés. Certains les utilisent alors des fins peu glorieuses pour manipuler et se servent des algorithmes pour enfermer l’utilisateur dans un cercle vicieux qui le conforte dans ces croyances. Ainsi peut-on peut être expliquer la montée du populisme en Europe sur les dernières années.
Les théories complotistes ont eu le vent en poupe durant la pandémie de la COVID-19. Le documentaire « Hold Up » sorti en 2020 a fait couler beaucoup d’encre pour toutes les fausses informations que le documentaire avance. Cependant, bien que démontré complotiste et malhonnête, de nombreuses personnalités ont soutenu le projet dès sa sortie. En effet, il a même été relayé publiquement par l’ex première dame de France, Carla Bruni.
Dans un même registre, nous savons que les canaux de communication digitale sont des espaces importants de conflits entre différents états et sont donc des acteurs de la géopolitique actuelle. Il y a donc une vraie nécessité d’encadrer l’ensemble de ces canaux. Seulement il est difficile, voire impossible de le faire. Si l’Europe et la France se munissent d’un maximum de protection pour leur utilisateur, elles ne peuvent pas contraindre tous les pays du monde à faire de même.
Le digital comme outil politique
Pour aller plus loin, la transformation politique que l’on peut connaître se passe à travers les outils de communication digitale. Mais un pays comme la Chine va plus loin dans cette transformation. En combinant cet essor à leurs avancées technologiques de pointe, la Chine se munit d’un outil de contrôle des populations imbattables. Pour résoudre cette mondialisation digitale et la difficulté politique à cerner, puis gérer l’ensemble des échanges sur les réseaux, la Chine a décidé de lancer un système fermé permettant un cyber-contrôle total par le pouvoir.
Sans en arriver aussi loin, le digital est évidemment un espace où le pouvoir politique veut se renforcer. Emmanuel Macron réagit régulièrement sur des plateformes comme Twitter mais il sait également se mettre en avant sur des plateformes comme Youtube auprès d’influenceurs. Il s’agit là d’outil de communication mais la plus grande force a été d’amené l’univers du digital sur des canaux bien plus historiques que sont les débats de l’entre-deux-tour. Les expressions « poudre de perlimpinpin » et « finito », respectivement en 2017 puis en 2022, ont eu pour but de faire réagir. Cette stratégie a été plutôt efficace puisque les canaux de communication digital se sont retrouvés en effervescence à la suite de l’utilisation de termes plutôt décalé et qui correspondent plus à son monde qu’à ceux de la télévision.
Ce que montre également cet exemple c’est que les nouveaux canaux de communication ne peuvent pas supplanter les anciens. De plus, si certains ont grandement profité de la transformation du monde politique autour du digital pour se faire connaître, la politique est un univers très codifié dont certaines branches plus traditionnalistes ne s’occupent pas du tout de cette transformation, ou du moins avec moins d’aplomb.
L’avenir nous montrera définitivement jusqu’où le digital et la politique peuvent aller mais il semble qu’il y a de nombreux biais encore à creuser. Occuper l’espace médiatique comme le fait Sandrine Rousseau ou mettre en avant continuellement ses valeurs et croyances comme le fait Fabien Roussel ? Être un outil parmi d’autre ou devenir une arme de contrôle comme le fait la Chine ?
Pour aller plus loin dans la réflexion :
• https://mbamci.com/politique-digital-communication/
• https://www.friendly-agence.com/digital-et-politique/
- Le Podcast Natif : Le Nouveau Pouvoir des Marques en 2024
- Le matcha : De la tradition japonaise au phénomène mondial des réseaux sociaux
- Luxe et Innovation : L’Essor des Expériences Client Immersives
- Présidentielle Américaine 2024 : Comment les candidats maîtrisent leur communication
- Comment les Athlètes Influenceurs redéfinissent la Stratégie de Communication aux JO 2024 ?